Carence en vitamine B1 : cause de certains SIBO ou d’autres troubles digestifs chroniques ?

par | 5 Déc 23 | Blog, Santé digestive

La vitamine B1 ou thiamine est une vitamine dont on ne parle quasi pas en France…mais beaucoup plus outre-Atlantique. Ils se sont effectivement aperçus que si le SIBO pouvait bien souvent occasionner des carences en vitamines B, dont la thiamine, dans certains cas ce serait le manque de vitamine B1 qui pourrait déclencher (ou mimer !) un SIBO.

Qu’en est-il vraiment ? Quels sont les symptômes associés à un manque fonctionnel de thiamine ? Je vous dis tout (ou presque) dans l’article qui suit.

La vitamine B1 ou thiamine : à quoi sert-elle ?

  • La vitamine B1 est un acteur clé dans le métabolisme du glucose, donc dans la production d’énergie. Un manque de thiamine gène la production de glucose par sa voie habituelle et l’oriente vers une voie moins efficace, par sa fermentation en lactate (ou acide lactique).
  • La thiamine joue également un rôle important dans le métabolisme des acides gras et leur utilisation à des fins énergétiques.

Concrètement, en cas de manque de thiamine, il y a moins d’énergie disponible pour les muscles, pour le cerveau, et généralement pour les cellules.

  • La vitamine B1 est essentielle au bon fonctionnement de notre système nerveux! Elle intervient dans la production d’acétylcholine. Il s’agit d’un neurotransmetteur clé intervenant dans la communication nerveuse. Elle joue donc un rôle essentiel dans le bon fonctionnement du nerf vague (entre-autres !)
  • Enfin, la thiamine permet la production de GABA, le neurotransmetteur agissant comme anxiolytique naturel (quand on en manque, on est plus sujet à l’anxiété et aux crises d’angoisse, par exemple). A l’inverse, un manque de thiamine peut augmenter la production de glutamate, un composé plutôt neuro-excitateur.

Les conséquences sur le corps d’un manque de vitamine B1

Conséquences sur le système nerveux

Le manque de thiamine affecte d’abord la partie du cerveau impliquée dans la régulation du système nerveux autonome. Cette zone située en bas du cerveau est une forte consommatrice d’énergie. On a vu plus haut que le manque de thiamine pouvait affecter le métabolisme du glucose…et donc la production d’énergie. Or, les études ont montrées qu’un manque d’énergie au niveau de cette zone du cerveau pouvait entrainer un dysfonctionnement du système nerveux autonome ou « dysautonomie ». Elle se traduit par différents symptômes comme une tachycardie au repos, des arythmies cardiaques, des troubles de la motilité intestinale, une gastroparésie ou encore une hypotension orthostatique.

La vitamine B1 participe également à la production d’acétylcholine qui est un médiateur de la réponse nerveuse, notamment au niveau du nerf vague et des neurones entériques (logées tout le long de l’intestin). Ce nerf vague part du bas du cerveau et vient innerver le cœur, l’estomac, la vésicule, l’intestin grêle… Il est donc directement responsable de notre bonne digestion. Si l’acétylcholine n’est pas correctement produite, l’information a du mal à arriver jusqu’aux organes et donc cela va impacter directement la digestion.

Conséquences sur la digestion

Suite à ce qui a été dit ci-dessus, il est assez évident de voir comment le manque de vitamine B1 peut venir impacter la digestion ! Entre les premiers signes de dysautonomie et le fonctionnement non optimal du nerf vague par manque de transmission nerveuse, on peut rapidement observer :

  • Une gastroparésie et un manque d’acidité de l’estomac, une moindre production d’enzymes par le pancréas et une moindre excrétion de bile par la vésicule biliaire. L’ensemble occasionnant une insuffisance de digestion haute,
  • Un souci de motilité au niveau de l’intestin par une moindre contraction des muscles lisses, donc plus de constipation,
  • Une diminution de la production d’enzymes de la bordure en brosse et affinement de la zone de microvillosités au niveau intestinal 1. Cela se traduit par des malabsorptions intestinales (donc des carences).

Il est à noter que le souci de motilité (souvent caractérisé par de la constipation) ainsi que le manque de digestion haute dont des facteurs de déclenchement de SIBO…

Conséquences d’un manque de thiamine sur la perméabilité intestinale

Comme expliqué dans un précédent article, l’augmentation de la perméabilité intestinale entraine une malabsorption des nutriments, donc des risques de carences à moyen ou long termes. Elle favorise aussi le passage d’endotoxines dans le sang à l’origine de phénomènes inflammatoires.  Par conséquent, l’amélioration de l’intégrité de la barrière épithéliale intestinale devrait être l’un des principaux objectifs de tout protocole de « guérison intestinale ». Cependant, le simple fait d’ajouter des compléments tels que la L-glutamine ne résoudra pas le problème à la base.

Il est important de savoir que la perméabilité de l’intestin est modulée par des centres de contrôle supérieurs, et l’intestin s’adapte simplement aux signaux qu’il reçoit de l’environnement local (présence d’aliments inflammatoires, de toxines,…) et systémique.

 Le nerf vague est en réalité un contrôleur clé de la perméabilité intestinale. Bien que les mécanismes ne soient pas bien compris, le nerf vague sert à maintenir la barrière intestinale en augmentant l’expression des protéines de jonction serrée (occludines). Il a même été démontré que la stimulation du nerf vague protège la barrière intestinale contre la perméabilité induite par les LPS ou endotoxines et prévient également la perméabilité intestinale induite par l’inflammation2. Ainsi, l’activité vagale assure une fonction protectrice à la barrière épithéliale intestinale et un faible tonus vagal rend l’épithélium intestinal plus perméable, favorisant ainsi l’inflammation systémique et les maladies inflammatoires chroniques.

Conséquences autres :

Le mauvais métabolisme des sucres au niveau musculaire favorise la production de lactate ou acide lactique…ce qui se traduit par des courbatures ou une capacité de récupération musculaire moindre.

Les causes d’une carence en vitamine B1

On peut manquer de thiamine en raison d’apports insuffisants, ce qui, malgré la croyance actuelle, est de plus en plus fréquent en raison de l’augmentation des aliments ultra-raffinés et ultra-transformés. Ces aliments souvent très riches en glucides de mauvaise qualité augmentent les besoins en vitamine B1 pour métaboliser ces sucres, sans apporter en parallèle cette même B1 (on la trouve plutôt dans les céréales complètes, les légumineuses,  les fruits à coque, ainsi que la viande de porc et le soja). L’alcool est un autre facteur connu de déficience en thiamine.

On peut également avoir une alimentation apportant correctement de la vitamine B1, mais que celle-ci soit mal absorbée au niveau cellulaire ou trop éliminée. Il est également possible que la balance entre besoins et apports soit déséquilibrée (cf graphe ci-dessous)3.

Déficience ‘fonctionnelle’ en thiamine

Selon Eliott Overton et le Dr Lonsdale, il pourrait aussi exister une déficience dite fonctionnelle.

D’une part l’inflammation et le stress oxydant peuvent causer la destruction de la thiamine. Ces deux processus pourraient aussi bloquer les enzymes utilisant la vitamine B1, créant ainsi l’équivalent d’une carence mais plutôt au niveau local (au niveau d’un organe, d’un tissu, de cellules plutôt que du corps entier).

Mise en évidence d’un manque en B1: pas si simple !

Tout cela explique pourquoi un dosage classique de thiamine dans le sang ne soit pas forcément représentatif d’un manque de vitamine B1 au niveau cellulaire. En revanche, selon E.Overton, il semblerait que les dosages urinaires du pyruvate et du lactate soient plus représentatifs. Personnellement, je n’ai trouvé que des dosages sanguins pour ces deux marqueurs en France…est-ce aussi fiable ?

Se complémenter en vitamine B1

Comme pour tout nutriment, il existe différentes formes de thiamine, dont la tolérance, la biodisponibilité, la capacité à passer la barrière hémato-encéphalique…et le prix, varient. On trouve notamment les formes suivantes :

  • Le mononitrate de thiamine est la vitamine B1 la plus répandue dans les compléments avec le chlorhydrate de thiamine. A faible dose (=celle qu’on trouve dans les compléments), ils sont assez peu absorbés. Ils ont besoin de transporteur pour passer la barrière hémato-encéphalique, ce qui est un facteur limitant. Ils sont en revanche peu chers.
  • La Benfothiamine est plus biodisponible et est utilisé pour la neuropathie diabétique et montre un intérêt croissant dans la maladie d’Alzheimer,
  • L’Allithiamine peut être extraite de l’ail. Elle est fortement biodisponible et passe la barrière hémato-encéphalique plus facilement, donc agit très bien au niveau du système nerveux central. Elle est plus chère et peut être moins bien tolérée.
  • Le disulfure de tétrahydrofurfuryle de Thiamine (TTFD), est l’homologue synthétique de l’Allithiamine et a les mêmes propriétés que cette dernière.
  • La sulbuthiamine. Une forme artificielle de thiamine incluant du souffre (pas toujours bien toléré). Très biodisponible, elle est plutôt recommandée dans les cas de fatigue, notamment matinale (augmente l’effet de la dopamine).

Si vous pensez manquer de vitamine B1, vous pouvez commencer par tester les formes les plus courantes et voir déjà si cela vous apporte un mieux.

Dans le cadre de troubles chroniques et/ou de déficit chronique en B1, le Dr Lonsdale et E.Overton postulent qu’il y aurait une adaptation négative du corps avec une diminution d’activité des différents acteurs utilisant la thiamine (enzymes, transporteurs). Ils recommandent ainsi une dose élevée et soutenue pour « relancer » ces processus, dose pouvant aller jusqu’à 1000x la dose journalière recommandée ! Il n’y a pas de toxicité de cette vitamine qui est hydrosoluble (donc éliminée dans les urines), toutefois je vous recommande de ne pas vous y lancer seul(e) et de vous faire accompagner par un thérapeute formé.

 

Sources :
  1. Mahmood S, Dani HM, Mahmood A. Effect of dietary thiamin deficiency on intestinal functions in rats. Am J Clin Nutr. 1984 Aug;40(2):226-34. doi: 10.1093/ajcn/40.2.226. PMID: 6465054.
  2.  Bonaz B, Bazin T, Pellissier S. The Vagus Nerve at the Interface of the Microbiota-Gut-Brain Axis. Front Neuroscience. 2018 Feb 7;12:49. doi: 10.3389/fnins.2018.00049. PMID: 29467611; PMCID: PMC5808284.
  3. Eliott OVERTON – e-book Protocols for addressing thiamine deficiency & the paradoxical reaction, 2023

Je précise que la majorité de ce texte est inspiré des écrits de Eliott OVERTON, Nutritional therapist

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